[trait # 1]

Ah ! Si j'étais un HoMmE...
[Attends, toi en homme ? Laisse-moi rire. Comme si t'avais pas déjà assez de poils sur les jambes, des épaules de déménageur, des pieds longs comme une péniche...]
[...et tu te crois drôle là ?]
[bah euh... ouais.]

Moi en homme, vaste sujet donc. Et un peu fou aussi...
[tu m'étonnes]
[la ferme]

Mais suite à une invitation de Miss Zen, et parce que j'ai reçu une éducation ou refuser les invitations est mal élevé, je me suis dit : pourquoi pas ?
[t'aurais mieux fait de te taire moi je crois plutôt]

En même temps, c'est difficile.
[de de taire ?]
[tu vas me laisser parler oui]

Bref, c'est difficile parce que je me sens tiraillée entre l'impression de vouloir parler comme si je devais décrire l'homme qui peut me plaire, ou l'envie plus complexe de définir l'homme que je serai si j'étais vraiment un homme...
Vous voyez pas ce que je veux dire c'est pas grave...

...

- g., dans la peau d'un homme, l'espace de 39 min. et 54 secondes, jeudi 26 Avril 2OO7 -

Ce matin, je suis à la bourre, comme tous les jours.
Sacrifier mes grasses mat', c'est vraiment trop dur.
Et faut que je me rase la tête, comme tous les jours aussi.

Pas que j'entretienne une image à la Lincoln Burrows mais j'ai dégotté un contrat avec une marque de rasoirs, et l'idée c'est de tout raser - pas de tout montrer, on se calme les filles.

Bref, ce matin je suis à la bourre.
Faut dire aussi que j'ai une une flemme de prince depuis l'âge de dix ans, quand mes parents ont gagné le million au Loto et qu'on a eu une femme de ménage.
Bon, en vérité, c'est surtout parce que j'ai regardé le foot hier, celui du pays à la bannière étoilée.
Le Superbowl me laisse encore quelques souvenirs bien frais dans la tête, j'y peux rien, j'aime ce sport.

Je me regarde dans la glace, ma plaie cicatrise bien.
J'ai encore voulu défendre une fille la semaine dernière. Ça m'apprendra.
De toute façon, je me fais pas trop de souci, c'est pas la première cicatrice que j'ai et ce ne sera sûrement pas la dernière.
Et puis mon nez est déjà cassé, c'est pas une petite plaie qui va venir me gâcher l'existence.

Par contre, j'ai des yeux à faire peur à la voisine - elle a cinquante ans et à moins d'être habillé en scout, elle vous prend illico pour un tueur en série.
Avec ma cicatrice, je ne vais pas faire le poids.
[Pourtant, la voisine du dessous - elle a 25 ans - trouve que ça me donne un charme fou, allez savoir pourquoi]

Mon boulot de DJ m'offre une vie tellement décalée que je ne connais aucun de mes voisins à part ces deux femmes.
Bon, je ne vais pas me plaindre non plus, j'ai eu la chance de pouvoir choisir ce que je veux faire dans la vie et j'ai même droit à des regards de demoiselles toutes les nuits sous les boules à facettes.
[Même si c'est d'elle dont je rêve, en secret]

Mais avec mon boulot, on me traite facilement d'insensible et de profiteur et je ne sais pas trop nier.
Je brise des coeurs sans le vouloir.

Après la séance photos, je retrouve mon cinq pièces loué en rêvant d'un chalet à la montagne.
La ville m'asphyxie.
Mais je veux le partager avec elle, ce chalet... alors j'attends.

J'ai six heures à tuer avant de rejoindre mon antre, la boite de nuit ou j'exécute mes prouesses depuis cinq mois.
Je vais vite m'en lasser, je le sens. J'ai trop la bougeotte.
Et je ne suis jamais très fidèle à mes employeurs. Quant aux femmes...

Je me bats alors pendant des heures devant le miroir parce que, oui, je suis un peu narcissique.
Et là, je découvre une petite culotte sur le lit. Merde, je l'avais oubliée.
Elle dort encore. Je ne sais même plus son nom.

Le défilé des demoiselles dans ma vie et dans mon cinq pièces n'efface pourtant pas celle à qui je pense vraiment.
Nicole, je crois que c'est son prénom.
Je suis un grand garçon, mais un trouillard quand même.
Et je n'arrive jamais à l'appeler.

Tout ce que je sais d'elle, c'est qu'elle est plus âgée que moi. Ça ne me dérange pas trop à dire vrai.
Mais j'ai l'impression qu'elle me fuit. Ou alors elle n'aime pas mes pantalons trop larges, mes t-shirts XL, mes casquettes et mes baskets.
Encore que la dernière fois qu'on s'est vus, j'avais des tongs à pois blancs qui n'étaient même pas à moi...

Moi, j'ai envie que ça change et qu'elle me regarde dans les yeux, pas au ras du sol.
Alors pour faire avancer les choses, hier, j'ai acheté Valéry Larbaud et je corne ses pages, pour m'inspirer.
Je vous tiendrai au courant...

Je me parfume avec Armani Code et je file faire les courses quand je tombe sur ma mère.
Elle me dit que ça sent trop fort et elle me sermonne parce qu'on voit mon caleçon dépasser de mon pantalon.
Alors je lui dis "tu veux du beurre salé maman ?"
Mais en guise de réponse, elle m'apprend que mon meilleur pote va dire oui à l'église dans un an.

Je me regarde dans le reflet d'une vitrine.
Et moi, suis-je donc un séducteur insatiable ou juste un vieux garçon ?

...

Tiens c'est marrant j'ai l'impression que je pourrais continuer encore longtemps comme ça.
Etrange ?

pois_blancs

Nota : bah oui parce que ce sont bien mes tongs après tout.

Edit post-publication :
Allez, je m'en vais m'auto-congratuler pour une fois [un peu de pommade, ça ne fait pas de mal] : je pensais pas que la photo rendrait aussi bien !

L'Homme

Partager cet article